Présentation de l'éditeur:
Pendant l’été 1972, Reykjavík est envahi par les touristes venus assister au championnat du monde d’échecs qui oppose l’Américain Fischer et le Russe Spassky. L’Américain se conduit comme un enfant capricieux et a de multiples exigences, le Russe est accueilli en triomphe par le parti communiste islandais, le tout sur fond de guerre froide.
Au même moment un jeune homme sans histoire est poignardé dans une salle de cinéma, le magnétophone dont il ne se séparait jamais a disparu. L’atmosphère de la ville est tendue, électrique. Le commissaire Marion Briem est chargé de l’enquête au cours de laquelle certains éléments vont faire ressurgir son enfance marquée par la tuberculose, les séjours en sanatorium et la violence de certains traitements de cette maladie, endémique à l’époque dans tout le pays. L’affaire tourne au roman d’espionnage et Marion, personnage complexe et ambigu, futur mentor d’Erlendur, est bien décidé à trouver le sens du duel entre la vie et la mort qui se joue là.
Je n'avais jamais lu de roman d'Arnaldur Indridason et je ne connaissais que de nom sa série d'enquête d'Erlendur. Les noms suffisamment exotiques pour me croire dans une histoire de viking -THOR, MARTEAU...hum désolée, encore traumatisée par Thor 2 ou blondinet a encore oublié son cerveau - conjugué au fait que le livre abordait la guerre froide à travers le prisme de la partie d'échec entre Spassky et Fisher m'ont convaincue de le lire. Et puis ce n'est pas comme si je n'aimais pas les polars nordiques et que Le duel est un prequel à la série des Erlendur....Comment ça des excuses?
J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman policier. Je lui ai trouvé de très nombreuses qualités, tant sur le plan narratif que stylistique. Le duel est aussi un roman sur la guerre froide et toutes les petites manigances qu'il pouvait y avoir de la part d'un camp comme de l'autre dans un pays neutre comme l'Islande.
L'ensemble est extrêmement bien dosé entre politique et crime. J'ai vraiment apprécié que l'intrigue policière ne soit pas reléguée au second rang et que finalement, la partie d'échecs, politique, souligne le récit comme un fil rouge. À travers les journaux, la radio, les informations qui circulent, le lecteur est presque dans la salle du match, sans pour autant quitter la scène de crime ou l'audition des témoins. C'est ce mélange subtile qui fait du Duel, un roman policier politique sans toutefois écœurer le lecteur.
On en apprend aussi plus sur l'Histoire de ce pays assez mal connu - de moi en tout cas - et notamment ses liens avec le Danemark et les épidémies de tuberculose dans les années 40-50 qui conduisirent beaucoup de jeunes islandais dans les sanatorium danois.
Ces très bonnes choses mises à part, je suis restée assez impressionnée par le personnage principal, Marion Briem. Il se trouve que pour nous les français, Marion est un prénom plus que courant et immédiatement définissable comme féminin...ce qui n'est pas le cas en islande ou Marion a l'air d'être plutôt rare. Je m'en suis rendue compte pendant ma lecture, lorsque par plusieurs fois, certains personnages ont fait référence à ce prénom de Marion comme étrange, ce à quoi Briem répond toujours que c'est le nom que sa mère lui a donné.
De fait, du début à la fin du roman, on ne sait pas si Marion Briem est un homme ou une femme. Je tire mon chapeau à Indridason et à son•a traducteur•trice parce que jamais ceux-ci n'emploi d'adjectifs accordables en genre. À aucun moment, Marion Briem parle de lui/elle dans des termes qui nous laisseraient deviner qui il/elle est. C'est très étrange de se retrouver face à un personnage dont on ne sait où le placer sur un échiquier sexué. Ce n'est pas grave à bien des égards, c'est l'enquête qui importe après tout, mais il est du coup assez difficile de se représenter physiquement un personnage. Indridason compense ce "manque" par une bonne description psychologique de Marion. Je l'ai beaucoup apprécié•e et trouvé•e très touchant•e notamment dans sa relation avec son amie d'enfance. Ce côté là de l'intrigue a du coup éveillé ma curiosité puisqu'on ne sait pas vraiment si leur relation risque de choquer - je rappelle que nous sommes en 1972 - ou si elle risque d'être perturbante du fait de leur passé commun.
Si Le duel ne parle pas d'échec au sens propre, il n'en reste pas moins qu'il retrace avec brio le fameux combat entre Fisher et Spassky et la personnalité des deux joueurs. Cette intrigue policière, sur fond de guerre froide et cet•te inspecteur•trice ambigu•e mais profond•e m'a beaucoup plu. À découvrir même si vous ne connaissez pas l'auteur!