mercredi 27 avril 2011

De chair et de sang - Michael Cunningham


Constantin Stassos, un immigrant grec, a épousé Mary, une belle Américaine d'origine italienne.
Promoteur immobilier installé à Newark, dans le New Jersey, il va bâtir sa réussite sur le dos de plus infortuné que lui et se révéler un homme violent. Mary est une "femme frustrée, qui accepte mal l'étroitesse de son quotidien.
Trois enfants naissent : Susan, l'aînée, a avec son père une relation qui frôle l'inceste. Billy, un garçon émotif, vulnérable, est incompris de son père, qui accepte difficilement son homosexualité. Zoé, la cadette, va vivre à Manhattan où elle s'adonne à la drogue. Enceinte d'un amant de passage, un Noir, elle est adoptée par Cassandra, un travesti, qui va l'aider à élever son fils.
Sous la façade respectable, le scandale est absolu.
Dans De chair et de sang, nous retrouvons tous les ingrédients qui ont façonné The Hours (où peut-être l'inverse!). Comme à son habitude, la famille qu'il nous offre à contempler: Constantin et sa femme Mary, leurs enfants Susan, Billy et Zoé ainsi que leurs petits-enfants, Ben et Jamal, sont tous des personnages torturés.
Susan essaye de trouver une place dans la vie, de ne plus être seulement la fille d'un immigré grecque et d'une italienne. Entre être reine et princesse, Susan a peur d'échouer. Seule des enfants Stassos à réellement aimer son père, elle tente pourtant de se soustraire à sa nature violente et incestueuse dont il se dédouane par son alcoolisme latent. Tout est propre et net dans la vie de Susan, enfin presque.
Billy, rebaptisé Will à l'Université, oscille entre haine et incompréhension. Haine pour son père qui voit en lui un gamin fragile puis une sorte de "folle", et incompréhension de lui-même. Comment accepter sa propre homosexualité? Comment gérer son corps et son cœur lorsqu'on est un gamin paumé et apeuré?
Zoé enfin, fille perdue dans la nature, en complet décalage avec sa propre famille part à la dérive dans le monde de la nuit, faisant la rencontre de Cassandra, un travesti particulièrement attachant. D'amants de passage à un autre, de piqures en piqures, Zoé ira-t-elle jusqu'à se perdre elle-même?
Le style de Cunningham est sobre mais violent, cru et souvent très dur tout comme le sont ses personnages et leurs névroses. Car il s'agit bien ici de névroses, presque transmises par la chair et le sang. On y retrouve les mêmes thèmes que ceux développés dans The Hours: l'homosexualité, le sida, les rapports délicats avec les parents qui en font un livre particulièrement fort et une sorte de satyre sociale des classes de "presque immigrés" aux Etats-Unis. L'appartenance à ce pays est aussi pour les personnages une obsession tout autant qu'une douleur. Ce fil ténu parcours le roman en filigrane.
Plusieurs fois j'ai eu envie de refermer De chair et de sang sans pousser plus avant la lecture mais je ne l'ai pas fait parce que l'écriture de Cunningham nous pousse comme dans un roman policier à aller plus loin à la découverte des personnages. Le fil se tend et le lecteur a envie de savoir ce qu'il va advenir de ces personnages dont on pressent malgré nous la fin.
Chaque chapitre a pour thème un des personnages et on le voit évoluer au milieu des autres. Le livre fonctionne également par année, en en sautant parfois plusieurs d'un coup. Des années 30 aux années 90, le lecteur est baladé dans le temps et explore également New-York (ville chérie de Cunningham) à ces différentes époques.
Un livre coup de point pour ceux qui aiment les récits "tranches de vie".
Merci à Blog-o-Book et à Livre de Poche pour ce partenariat.


2 commentaires:

ViCa. a dit…

Je le note sur ma LAL ! Je n'ai lu que "les heures" de cet auteur, ca me permettra de le lire une fois de plus.

Perséphone a dit…

Si tu as aimé les Heures tu vas aimer De chair et de sang je pense, c'est assez déprimant comme livre, plein de névrose mais c'est bien quand même.

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