mardi 19 juin 2012

Death comes to Pemberley - P.D. James


Présentation de l'éditeur: Rien ne semble devoir troubler l’existence ordonnée et protégée de Pemberley, le domaine ancestral de la famille Darcy, dans le Derbyshire, ni perturber le bonheur conjugal de la maîtresse des lieux, Elizabeth Darcy. Elle est la mère de deux charmants bambins ; sa sœur préférée, Jane, et son mari, Bingley, habitent à moins de trente kilomètres de là ; et son père adulé, Mr Bennet, vient régulièrement en visite, attiré par l’imposante bibliothèque du château. Mais cette félicité se trouve soudain menacée lorsque, à la veille du bal d’automne, un drame contraint les Darcy à recevoir sous leur toit la jeune sœur d’Elizabeth et son mari, que leurs frasques passées ont rendu indésirables à Pemberley. Avec eux s’invitent la mort, la suspicion et la résurgence de rancunes anciennes.

Autant le dire tout de suite, je ne lis pas de fanfiction, usually (vous aurez remarqué ma façon subtile de changer de langue? C'est la mauvaise influence de Cheshire et du Cambridgeshire). Je n'aime pas ça, je n'ai jamais aimé en écrire, ni en lire. Si je peux comprendre et apprécier certaines réécritures, les canon (à condition qu'elle soit intelligente), je ne suis pas une fan des continuations, ni des what if. (Merci à Cathy pour les termes de fanfictions fans, si j'ai fait une erreur, hurle!).
Si je comprends que les fan rendent hommage à leurs univers préférés, je comprends également la répugnance de certains auteurs. Bref, je n'en lis pas. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, je n'ai pas de prejudice contre les fanfictions, il s'agit simplement d'un monde qui m'intéresse peu.

Du coup, cela semble un peu awkward de commencer sa découverte des romans de P.D. James par une fanfiction justement, mais je me suis dis: P.D. James et la mort de Wickham, ça peut rendre quelque chose de bien. Après tout, je refuse de mourir idiote! Tam-Tam et Chi-chi m'ont convertie à la romance, alors pourquoi pas la fanfiction?

Je trouve ce travail de fanfiction très difficile s'il veut être bien réussi parce qu'il faut que le lecteur se sente chez lui, qu'il retrouve ses vieilles pantoufles (type charentaises en tartan) dès la première page.
J'ai bien aimé le résumé que P.D. James fait de Pride and Prejudice en détournant le point de vue. C'est assez surprenant car je n'avais jamais imaginé l'histoire de cette façon et elle arrive à nous montrer autre chose, même si pour le coup je n'ai pas du tout retrouvé mes charentaises! Cela dit, le résumé qu'elle en fait et les trous qu'elle comble (six années se sont écoulées), le tout est fait intelligemment, avec une plume vive qui est vraiment agréable.
Ce que j'ai aussi beaucoup apprécié (à une exception près), c'est que l'on retrouve bien les personnages du roman initial. Darcy se conduit et parle comme je l'imagine, le Colonel Fitzwilliam est un peu moins drôle mais l'histoire lui fait une belle part, Wickham fait du Wickham, tout comme sa femme qui reste insuportable. Quant à Jane et Bingley, ils sont parfaitement dans le ton. C'était un exercice difficile et j'admets que l'auteur s'en sort bien. On sent qu'elle connait Jane Austen sur le bout des doigts.

Le seul personnage qu'elle a, à mon avis, perdu de vue, c'est celui d'Elizabeth. Si au départ on sent une certaine joie de vivre et un sentiment de gaité qui colle bien avec le personnage, on perd tout ça assez vite au profit d'une anxiété chronique. A la lecture, j'ai eu l'impression qu'Elizabeth était tout le temps angoissée! Angoissée quant à l'histoire de meurtre, angoissée à cause de Georgiana, angoissée pour servir le thé à la bonne heure...si au départ je comprenais ce que l'auteur voulait faire, j'ai par la suite été lassée de ce manque de pragmatism que j'attendais d'Elizabeth. Elle y perd son wit, sa petite flamme.

Quand à l'intrigue, je me suis profondément ennuyée. Dès le premier tiers j'avais deviné deux parties de l'intrigue. Du coup, l'attente de la réponse m'a semblé longue. Même si je n'avais pas trouvé le meurtrier, le dénouement m'apparait posé comme un cheveux sur la soupe et j'avais hâte que ça se termine.

Cependant tout n'est pas mauvais! P.D. James prend son temps ce qui est tout à son honneur car elle respecte la procédure judiciaire de l'époque. Cela donne un cachet de véracité à l'intrigue non négligeable! J'ai beaucoup aimé aussi les références et clin d'oeil aux autres héroïnes de Jane Austen! Je ne vous dis rien de plus pour ne rien gâcher mais c'était particulièrement bien amené!

L'ensemble est loin d'être médiocre. Je pense que beaucoup de lecteurs y trouveront leur compte. Ce ne fut malheureusement pas mon cas. Je ne me suis pas du tout sentie à Pemberley avec mon Darcy et mon Elizabeth et l'intrigue m'a franchement ennuyée. J'espère que vous aimerez plus que moi. En tout cas, cela ne m'empêchera pas de me tourner vers d'autres P.D. James car je suis sûre que je ne serai pas déçue par le prochain!!!

dimanche 10 juin 2012

Nouvelles contemportaines - regard sur le monde

A DECOUVRIR!!!

Présentation: Trois auteurs contemporains se regroupent pour des nouvelles avec un autre regard sur le monde.

L'idée est originale, trois auteurs contemporains "à la mode", écrivent des petites nouvelles avec vue sur le monde. Depuis leurs fenêtres, Delphine de Vigan, Timothée de Fombelle et Caroline Vermalle se penchent tour à tour sur ce qui fait leur univers et leur façon de le concevoir.

Je ne lis pas beaucoup de nouvelles, c'est un genre qui me passionne peu et je lis aussi très peu de contemporains français. Cela dit, j'ai été attirée par la description qui en était faite. Et puis parce qu'il y avait Timothée de Fombelle aussi et comme j'adore cet auteur je ne pouvais pas vraiment passer à côté. Au final, un beau moment de lecture et une vraie révélation.

Prenons les nouvelles dans l'ordre ce sera plus simple. Nous commençons avec Delphine de Vigan, Comptes de Noël, l'histoire d'une petite fille très douée qui attend le retour de son papa, lui qui les a laissé sa soeur et elle pour s'installer de l'autre côté du monde. La nouvelle en soit est très jolie mais je n'ai pas été outre mesure satisfaite par l'écriture de l'auteure. La petite fille est attachante c'est vrai et le dénouement de la nouvelle est très drôle mais j'ai trouvé que Delphine de Vigan ne réussissait pas vraiment à reproduire un langage enfantin. On sent un peu trop que c'est un adulte qui parle et non un enfant et ça a gêné ma lecture. C'est peut-être aussi dû au fait que Delphine de Vigan n'écrit pas pour les enfants à la base, elle est sûrement moins rompue à l'exercice à l'inverse d'un Timothée de Fombelle. J'ai trouvé que cela se sentait mais cela est peut-être parce que je lis beaucoup de romans jeunesse? Je suis sûrement moins indulgent. Fondamentalement ça n'est pas une catastrophe, le récit reste maîtrisé et la nouvelle est très agréable mais c'est sûrement celle qui m'a le moins plu.

Timothée de Fombelle prend ensuite le relais avec 7 micro nouvelles, pas plus de 2 ou 3 pages à chaque fois. Timothée de Fombelle parvient en à peine quelques mots à nous immerger complètement dans son univers. C'est toujours très poétique, merveilleusement vrai et fascinant. La nouvelle "J'attends" m'a beaucoup ému tout comme celle sur l'ex-détenu qui a retrouvé un travail et une famille, "J'ai un travail". Celle-là était terriblement poignante. Certaines sont drôles d'autres tragiques mais toutes sont vraies, natures, presque crue de réalité.
Elles touchent au but sans aucun doute et vous laissent pantelant et essoufflé.

Mais mon véritable émerveillement tient dans les deux nouvelles de Caroline de Vermalle. Je ne connaissais pas du tout cette auteure mais après ce que je viens de lire je peux vous assurer que je vais poursuivre.
Caroline de Vermalle nous offre les deux dernières nouvelles du recueil, les deux plus longues d'ailleurs. La première, Un dernier tour nous plonge dans une nuit de Toussain. Un vieil homme nommé Gaston tient un manège sur une place de village. Il est tard et il a oublié de fermer...apparemment. En fait, il attend. Il attend un tout jeune homme, Louis, qui part à la guerre. C'est ce dialogue plein de vie que nous offre brièvement Caroline de Vermalle. Cette nouvelle m'a bouleversée, elle était tellement douce-amère qu'on en reste figé à la fin de la lecture, le coeur serré, un peu meurtri, en tout cas fragile comme un petit oiseau que l'on aurait au creux de nos mains.
Quant à "La fille du déménageur" elle met en scène un papa divorcé qui va tout faire pour sortir sa fille adolescente de la dépression dans laquelle est elle enfermée. Si la première nouvelle de Caroline de Vermalle est emprunte de tristesse, la seconde vous donne du baume au coeur et l'envie d'en découdre, de mordre la vie à pleines dents. Je me suis très rapidement attachée à ce papa un peu balourd qui ne sait pas du tout quoi faire mais qui cherche. J'ai beaucoup aimé la description de lui que donne ses collègues, elle est assez exemplaire de l'amour qu'il peut porter à sa fille. Cette nouvelle vous donne la pêche et vous la finissez dans un grand sourire.

Ce recueil a un goût de trop peu, c'est certain. Un condensé de vie, une perle de bonheur et une touche de drame. Ces nouvelles m'ont conquise irrémédiablement.

Merci à Cécile et au Livre de poche jeunesse pour cette superbe découverte!

vendredi 8 juin 2012

Douze hommes en colère (12 angry men) - 1957


Résumé: 12 hommes sont appelés à décider de la culpabilité ou de l'innocence d'un jeune homme pauvre, accusé d'avoir assassiner son père. Alors que 11 jurés votent la culpabilité, un seul vote l'acquittement. Comme la loi américaine le stipule, le vote se fait à l'unanimité...

CASTING

Martin Balsam .................................................................. Juré nº1
John Fiedler ...................................................................... Juré nº2
Lee J. Cobb ....................................................................... Juré nº3
E.G. Marshall .................................................................... Juré nº4
Jack Klugman ................................................................... Juré nº5
Edward Binns ................................................................... Juré nº6
Jack Warden ..................................................................... Juré nº7
Henry Fonda ..................................................................... Juré nº8
Joseph Sweeney ............................................................... Juré nº9
Ed Begley .......................................................................... Juré nº10
George Voskovec ............................................................ Juré nº11
Robert Webber ................................................................. Juré nº12

12 hommes en colère est un vrai huit clos comme on en voit peu. C'est un genre très difficile à faire au cinéma selon moi car si l'intrigue n'est pas complètement maîtrisé, l'ennui arrive vite. Heureusement ici, nous sommes rapidement captivés par le juré numéro 8 qui vient remettre tout en question.

Ce qui fait la force du film et du scénario surtout, c'est que le juré numéro 8 ne cherche pas à savoir la vérité, thème pourtant cher au cinéma hollywoodien, mais bien de penser 5 minutes à ce que l'on est en train de faire. Le personnage joué par Henry Fonda remet en cause la manière expéditive dont les autres jurés décident du sort du jeune homme en question. Il met au centre de la réflexion, le doute raisonnable principe fondamental de la justice américaine. Au fond, peut importe que l'accusé soit coupable ou innocent, le film ne répond d'ailleurs pas à cette question, ce qui importe c'est d'être sûr de faire le bon choix, d'envoyer ou non un gamin sur la chaise électrique pour les bonnes raisons.

Le juré numéro 8 est en présence de 11 membres hostiles qui ne comprennent pas tout d'abord pourquoi ils les retient dans cette pièce surchauffée pour une conclusion qui s'impose d'elle-même. Il leur demande alors de prendre quelques heures de leur temps pour réfléchir car le sort d'un enfant est entre leur main. Certains jurés ont d'emblée l'air plus malléables et indécis, tandis que d'autres sont déterminés. C'est le combat de ces 12 hommes que le spectateur a sous les yeux pendant 1h30.

J'ai beaucoup aimé la façon du juré numéro 8 de briser leur certitude les unes après les autres, de leur montrer que leur jugement est faussé soit par l'avocat de la défense qui n'a pas fait correctement son travail parce que commis d'office, soit parce qu'il juge le cas à l'aune de leur propre vie et de leurs propres préjugés. Il veut leur montrer que juger un homme, c'est tenter de se débarrasser de ce qui fait que nous sommes uniques, que nous avons une histoire et que nous sommes donc plus ou moins sensible aux faits abordés. Le travail fait sur les différents personnages est impressionnant parce que même si on ne connait pas leur nom ils ont tous un tempérament distinct.

Le juré nº1 tente d'être un bon président de débat même s'il se heurte parfois à l'hostilité et à l'agressivité de certains jurés. Le juré nº2 passe inaperçu, c'est un petit homme maigre à lunettes qui a dû mal à faire entendre sa voix. Le Juré nº3 est vraiment quelqu'un d'agressif mais de très intéressant. On sent que le personnage d'Henry Fonda veut montrer à travers lui tous les problèmes qu'il y a à juger par rapport à son propre vécu.
Le juré nº4 est aussi intéressant parce que c'est un homme cliniquement froid, il est très attaché aux faits et c'est par l'étude des faits qu'il se décidera. J'ai beaucoup aimé le juré nº5. C'est un homme discret qui vient des quartiers pauvres, les mêmes que celui du jeune homme accusé. Ils viennent du même milieux, donc il se sent à la fois proche de lui et en même temps il veut s'en éloigner. Son point de vue sera important car même s'il ne veut pas le dire, il connait les quartiers pauvres comme personne. Le juré nº6 n'a pas un très grand rôle mais on sent que c'est un homme sensible, raisonné et qu'il respecte beaucoup de chose, il prend par exemple la défense du juré nº9 (le plus âgé) contre le juré nº3 qui se montre vraiment odieux. Le juré nº6 (je n'avais pas reconnu l'acteur! il faut dire que je les vu dans des films récent où il avait 70 ans bien sonnés) est plus intéressé par son match qui commence à 8h qu'au procès qui se déroule en face de lui. Prendre son temps pour un juger un gamin des quartiers pauvres? Pourquoi faire? Et mon match alors?? J'ai eu envie de lui faire avaler les tickets du match plus d'une fois. Le juré nº9 prend fait et cause pour son collègue en soutenant le courage du juré nº8 qui va à l'encontre des autres. C'est un vieil homme solitaire qui apporte un éclairage nouveau sur le comportement de certains témoins. Le juré nº10 est tout simplement odieux et rempli de préjugés, ce n'est pas un homme qu'il juge mais carrément toute une classe sociale.


Il y a d'ailleurs une scène magnifique dans le film où les jurés déclarent d'une façon très belles leur mécontentement par rapport à ses propos.
Les deux derniers jurés sont plus isolés et interviennent un peu moins.

Les acteurs sont tous très bon car ils font bien ressortir l'individualité des personnages et il est impossible de les confondre. Henry Fonda est magistral de flegme, on a vraiment l'impression que tout est assez facile et le personnage en lui-même donne une impression de profondeur, on sent que c'est un homme qui réfléchi beaucoup.

Un très beau film, je n'ai pas vu l'heure passer et je le recommande chaudement.

jeudi 7 juin 2012

Le voyage de Mémé - Gil Ben Aych


A NE PAS MANQUER

Présentation de l'éditeur: 1962. La famille de Simon déménage. Elle quitte le nord de Paris pour s’installer à une vingtaine de kilomètres, à Champigny-sur-Marne. Tout le monde est déjà parti mais il reste à faire bouger Mémé. La grand-mère tout juste arrivée d’Algérie refuse catégoriquement de monter dans une voiture, un bus ou un métro. Elle veut marcher, un point c’est tout. Simon, son petit-fils, se voit chargé de l’accompagner à travers la capitale et la proche banlieue. En chemin, Mémé va de découverte en découverte. «T’y as vu celle-là… la jupe courte qu’elle porte et serrée… et çui-là, comme ça y dort ? Ici par terre ?…C’est pas possible ma mère… Qu’est-ce qu’on peut voir ici en France ! »

Ce petit livre est plein de poésie et chargé d'Histoire. Gil Ben Aych nous offre un moment admirable, la rencontre entre deux univers.
Ce roman détaille avec une grande finesse et une belle émotion le dernier chapitre du roman L'essuie-main des pieds du même auteur.

Etoile que l'on appelle Mémé est une pied-noire juive d'Algérie. En 1956 elle suit sa famille en France et s'installe chez son fils le papa de Simon. Mais bientôt la famille déménage à Champigny près de Maman et Papa chéri, les parents de la mère de Simon. Commence alors pour le petit garçon un voyage qu'il n'est pas près d'oublier car Mémé marche. Mémé c'est cette vieille dame restée coincée à Tlemcen, ville où l'on fait tout à pied ou à dos d'âne, ville où tout le monde est ton voisin et où il est impensable de passer devant la maison d'un proche sans s'arrêter lui dire bonjour.

Simon et Mémé vont donc devoir traverser Paris pour atteindre la nouvelle maison où l'on fait la fête. J'ai vraiment été touché par ce court roman parce qu'on sent bien le décalage entre les deux personnages. Ils nous font rire et nous énervent tour à tour. Si je comprends l'impatience de Simon, je m'émerveille aussi des découvertes de Mémé, de ses arrêts devant les boutiques qu'il n'y a pas en Algérie, ses commentaires sur les femmes de Paris qui ne ressemblent pas aux femmes de Tlemcen.
Le choc des cultures est assez grand. J'ai beaucoup rit lorsque Mémé demande un "citronné" au lieu d'un "citron pressé" et qu'elle ne comprend pas la différence.
Sa première visite du métro et du bus est assez épique aussi mais je pense que cela peut faire réfléchir les jeunes générations qui considèrent le progrès comme acquis. A travers les yeux de Mémé, l'on voit tout ce qu'on a gagné et ce qu'on a perdu.

Je n'ai pu m'empêché de trouver Simon très injuste envers cette grand-mère qu'il ne comprend pas et qu'il tire désespérément par la manche. Peut-être est-ce parce que sa grand mère préférée c'est Maman Chérie et non Mémé? Peut-être aussi parce que lui qui a quitté l'Algérie depuis longtemps dans sa tête ne comprend pas cette vieille femme qui se raccroche à sa vie? Si de temps en temps ses deux personnages se rencontrent, la plupart du temps ils restent isolés dans leur bulle, ignorant de la sphère de l'autre.

Le voyage nous mène dans différents coins de Paris et c'est aussi ce qu'il y a à "voir" dans ce roman. J'ai beaucoup aimé la réutilisation du vocabulaire pied-noir et la réutilisation du parler "mère juive" de Mémé. Ce livre à un goût particulier, il est plein d'odeur et de saveur. Mémé est une femme simple mais une bonne femme qui prend soin des siens.

Un roman avec un petit goût amer du passé et un joli goût sucré des souvenirs. A lire absolument!

Merci à Doriane et à l'Ecole des loisirs pour cette très jolie découverte.

mardi 5 juin 2012

Le livre des choses perdues - John Connolly


Présentation de l'éditeur: Il était une fois - car c'est ainsi que toutes les histoires devraient débuter - un garçon de 12 ans qui venait de perdre sa maman. Inconsolable, David a trouvé refuge dans les livres pour oublier le remariage de son père et la naissance de Georgie, son demi-frère. Une nuit, persuadé d'entendre sa mère l'appeler, David découvre un passage caché au fond du jardin. Il le franchit et se retrouve propulsé dans un monde fantastique, peuplé de personnages issus de ses lectures et de son imaginaire. Alors que la Seconde Guerre mondiale déferle sur l'Europe, David entame un périple à la recherche d'un vieux roi qui conserve ses secrets dans Le Livre des choses perdues, sésame qui permettrait au jeune garçon de quitter ce royaume. Mais le conseiller du souverain a pour lui d'autres desseins...

Dit comme ça on a grandement l'impression d'une énième réécriture des comtes de fées. En fait pas vraiment car si l'auteur réécrit les contes de fées nous ne sommes pas du tout dans un bel univers roses avec le grand amour et l'Amitié. Ce qu'il faut savoir, c'est que ce roman existe aussi bien en VO qu'en VF dans une double édition: c'est à dire qu'il est disponible à la fois en jeunesse et chez les adultes.
Que cela soit clair: Le livre des choses perdues n'est PAS un roman pour la jeunesse! Je suis catégorique, ce roman n'a rien à faire chez la jeunesse. Je veux bien qu'il soit considéré comme Young Adult mais vraiment, il n'a pas sa place dans une maison d'édition pour les plus jeunes.

Le livre des choses perdues ressemble à un Alice in Wonderland qui aurait mal tourné. Vous avez cette même impression de sans queue ni tête mais en beaucoup plus sombre. Le monde que va découvrir David est un monde dangereux, peuplé de ses pires cauchemars.

Le personnage de David est intéressant car c'est un petit garçon complexe. A la fois bouleversé par la mort de sa mère et le remariage brutal de son père, on sent qu'il n'a apparemment pas beaucoup d'affection pour ce nouveau petit frère Georgie. Il a l'impression d'être exclu de cette nouvelle vie, de cette nouvelle famille où il ne trouve pas sa place. Le livre des choses perdues est un roman psychologique car les pensées positives comme négatives de David sont au centre de l'intrigue. Tout commence par lui et tout fini par lui. Ce petit garçon va beaucoup évoluer et comprendre des choses sur lui même qui vont - durement - le faire grandir.

Tout autour de David gravitent des personnages plus ou moins sympathique. Il y a le chasseur, homme courageux et Roland, le chevalier déchu que j'ai trouvé très bien écrit. Son personnage va aborder des thèmes particuliers mais tout en finesse ce qui est très appréciable. John Connolly vous laisse arriver à vos propres déductions, il n'est pas constamment en train de vous mettre les pistes évidentes sous le nez. Ce roman est un voyage initiatique aussi pour le lecteur.
Le Crooked-man est proprement terrifiant. Il est l'incarnation de nos pires cauchemars et quand je dis pires cauchemars je ne mens pas. Nous sommes très loin de la simple peur du noir ou d'un monstre sous l'escalier. D'ailleurs lorsque David se rend dans les caves du Crooked-man c'était le summum du tordu et de l'horreur. Je vois bien le personnage joué par Robert Carlyle d'ailleurs mais en plus noir encore, sûrement plus tordu car ce Crooked-Man est vicieux. Lorsqu'il parle de Roland à David, ses propos sont des insinuations vraiment malsaines et même si David s'excuse et comprend que le Crooked-man a dit des choses horribles, David s'en veut de s'être plus ou moins volontairement laissé convaincre. C'est un personnage insidieux...

Le livre des choses perdues est aussi une réécriture ingénieuse des contes de fées. Les comtes sont détournés dans leurs aspects les plus noirs et affreux. Nous avons par exemple une réinterprétation du Petit-Chaperon rouge assez particulière, d'un conte sur une chasseresse que j'avoue ne pas avoir identifié, de Rumpelstiltskin (Crooked-man) et de Blanche-Neige et les sept nains. J'ai adoré la réécriture de Blanche-Neige et de ses nains communistes qui est aussi (accessoirement) le seul moment drôle du récit.

Parce qu'il faut aussi le savoir, Le livre des choses perdues est très bien écrit. Le langage de John Connolly est captivant, fascinant et diablement réel. Ce roman est un roman d'ambiance, à la Rebecca de la Daphné du Maurier où dés l'ouverture des pages, l'ensemble du récit tombe sur les épaules du lecteur. Dès que j'ouvrais le roman j'avais l'impression que tout devenait noir autour de moi et que j'étais privée de tout espoir. Nous sommes un peu des Frodon porteurs de l'anneau pour être plus parlant.
Cela explique aussi pourquoi j'ai mis 6 mois à le lire.

J'ai adoré ce roman dont on ne peut pas avoir, à mon sens une opinion mitigée, car il est réellement puissant, au-dela même de l'idée de réécriture (réussie) et du Crooked-man. Je l'ai lu en vo et je n'en ai pas perdu une miette contrairement à ce que je pensais. Je ne le conseille pas aux personnes déprimées et je conseille d'alterner la lecture avec un roman plus léger.

Une lecture à ne pas louper.

lundi 4 juin 2012

Dracula mon amour - Syrie James


Présentation de l'éditeur: Mina est amoureuse et sur le point d'épouser l'homme qu'elle aime. Sa meilleure amie, la jolie Lucy, est elle aussi sur le point de se marier. Les deux jeunes femmes décident de partir en vacances à la mer pour profiter de leurs derniers moments de célibat ! Mais l'arrivée dans leur vie d'un gentleman fascinant, ténébreux et sulfureux, va ébranler toutes leurs certitudes. Lucy tombe mystérieusement malade, et Mina, quant à elle, est soudain assaillie par des désirs inavouables...

Voila, ça n'arrive pas souvent mais ça doit bien arriver de temps en temps. Ceci est l'instant "GRRRR" pour les fan de Bram Stoker. Ne dites pas que je ne vous aurais pas prévenu. Vous savez que je ne suis pas une fan de vampire, c'est à dire que je suis une puriste: pour moi il y a Bram Stoker et Anne Rice. J'avais espéré retrouver un peu de cela ici, malheureusement ce ne fut pas le cas. Dracula mon amour est une cruelle déception.

Syrie James est une habituée des réécritures et investissement d'univers puisqu'elle a déjà écrit un journal de Jane Austen (je ne sais pas s'il est publié en français). J'ai toujours pensé que les réécritures n'avaient d'intérêt que: si elles prenaient le roman dont elles s'inspirent complètement à rebours ce que fait un peu John Connolly lorsqu'il réécrit "Blanche Neige" dans Le livre des choses perdues. Une réécriture peut aussi prendre un autre point de vue: autre personnage, transposition etc.

Or ici, Syrie James ne fait rien de tout cela. Le cadre reste le même que celui du roman, le XIXe siècle anglais de Bram Stoker, l'histoire n'est pas prise à rebours et nous ne changeons pas vraiment de perspective. Nous perdons tous les journaux, celui de Jonathan et de Van Helsing pour se concentrer sur celui de Mina ce qui à mon sens perd de l'intérêt. Ensuite, Syrie James introduit une histoire d'amour entre Dracula et Mina. Mina nous raconte donc tout ce qu'elle n'a jamais dit dans le "dracula" original. Soyons donc clair, Syrie James réécrit le Dracula de Coppola, sans le kitch et Anthony Hopkins.

Reprenons les choses points par point: Tout d'abord l'épuration des autres journaux. C'est ce qui faisait tout le charme et l'intelligence du roman de Bram Stocker, cela permettait de confronter les univers et le personnage car effectivement il se montre charmeur avec Mina mais horrible avec Jonathan. Cela donnait une vue plus complète du vampire. De plus, cela permettait aussi de construire les personnages par opposition, la voix de Mina se différenciait de celle apeurée de Jonathan et de celle grandiloquente de Van Helsing.
En second lieux, le personnage de Mina dont elle fait un bas-bleu m'a dérouté. Mina est quelqu'un de très fort chez Bram Stocker mais qui a aussi une part de faiblesse ce qu'arrive bien à exploiter Dracula justement. Chez Syrie James en revanche Mina est liée par les sentiments contradictoires qui l'unissent d'une part à Dracula et d'autre part à Jonathan, elle ne sait pas faire la part des choses entre "son devoir" et son attirance pour Mr. Wagner. C'est dommage car la Mina que j'ai en tête fait assez vite la part des choses et trouve en Van Helsing, Jonathan et leur amis un véritable rempart contre "La Bête".
Le gothique est complètement absent de cette version, on ne ressent pas l'ambiance victorienne qui habite l'oeuvre originale et c'est dommage parce que c'est une énorme partie du travail de Bram Stocker sur l'oeuvre. C'est l'inscription dans une époque et puisque l'auteure a décidé de ne pas transposer l'histoire dans un autre lieu ou un autre temps, le gothique fin XIXe siècle était absolument incontournable et je pense qu'elle a loupé le coche.

Je trouve que cette réécriture manque complètement d'originalité et se focalise sur cette histoire d'amour qui me semble superflue. J'aurai aimé avec le point de vue de Jonathan sur cette femme amoureuse qui s'éloigne, ainsi que celui de Van Helsing peut-être plus clinique sur une possible chute de Mina telle une seconde Lucy.

La plume de Syrie James est revanche loin d'être mauvaise. On sent que c'est une femme qui a longtemps travaillé dans le monde de l'écriture. Toutefois - et là c'est une vraie question que je pose - certaines tournures de phrase m'ont gêné et notamment le langage de Lucy et de Mina. J'ai le souvenir de Dracula de quelque chose d'assez guindé voir pudique chez Mina tandis qu'effectivement Lucy est un peu plus provocante et relâchée. Je ne sais donc pas si c'est le travail du traducteur ou l'oeuvre de la version originale mais lire Mina et Lucy comme deux jeunes femmes du XIXe siècle m'a vraiment dérouté.

Je suis donc totalement passée à côté. Je ne pense pas que ce roman pourraient plairent aux fans de l'oeuvre originale de Bram Stocker qui risqueraient d'être déçus mais ceux qui n'ont jamais lu le roman gothique ou qui seraient effrayés par le style XIXe pourraient commencer par là.

Merci à Cécile et Lecture Academy pour cette lecture!

samedi 2 juin 2012

Gregor - Tome 1 - La prophétie du gris - Suzanne Collins


Présentation de l'éditeur: Gregor et sa soeur Moufle sont des enfants américains, métisses, orphelins de père et bloqués à New York... des enfants en somme tout à fait ordinaires. Jusqu’à ce qu’ils passent dans le conduit d’une machine à laver pour atterrir dans le monde de Souterre. Ils y découvrent un univers étrange, peuplé d’humains à la peau translucide, de chauve-souris domestiquées, de cafards qui parlent et de rats malfaisants. Gregor n’a qu’un désir : retourner chez lui. Mais rares sont ceux qui « remontent » de Souterre sans l’accord de Luxa, la future reine, guerrière impassible qui défie Gregor après une tentative de fuite.

Grégor ou The Underworld Chronicles en version originale est une série jeunesse en cinq tomes publiée aux Etats-unis entre 2003 et 2007 (soit avant Hunger games).

J'ai eu du mal à croire que cette série avait été écrite par la même auteure qu'Hunger Games! Non seulement cette série est très jeunesse (ça se sent) mais la réflexion est beaucoup moins poussée que dans Hunger Games. Cela dit, maintenant que je sais qu'elle a écrit la série de Gregor après Hunger Games cela s'explique. Gregor est un balbutiement de ce sera Hunger Games.

Mais revenons à nos moutons...heu je veux dire Chauve-souris. Comme l'indique mon résumé, Grégor un petit garçon de onze ans qui vit dans un appartement de New-York avec sa grand-mère, sa mère, sa soeur Lizzie et sa toute petite soeur Moufle, s'ennuie. Deux ans auparavant son père a disparu et depuis Grégor est l'homme de la maison. C'est notamment pour ça qu'au lieu d'aller s'amuser en camp de vacances avec Lizzie, il reste bloqué chez lui pour s'occuper de sa grand-mère qui n'a plus toute sa tête et de Moufle.

J'ai aimé ce début même si j'aurai d'avantage apprécié une mise en bouche plus longue parce que bon...sans exagéré et dire que j'aime les débuts à rallonge, le début de Grégor fait un chapitre! En un chapitre il faut qu'on digère l'intégralité des problèmes existentiels du petit garçon avant que celui-ci et sa soeur ne tombe dans l'aération de la buanderie. Je persiste à dire qu'une petite longueur supplémentaire aurait été appréciable. Sinon, cette intro rapide à le mérite de nous plonger directement dans l'histoire et laisse les pages récentes pour l'aventure.

Il s'agit ici d'un roman-quête tout à fait classique. Le héros rencontre de nouveaux personnages, apprend qu'il est le héros attendu d'une vieille prophétie et pars dans une quête afin de la réaliser. Jusque là il n'y a pas de quoi être chamboulé. Suzanne Collins pense même à la jolie prophétie en comptine, avec un ou deux pièges dedans. Je les avais vu venir les pièges et j'avais déchiffré la prophétie à la première lecture mais je ne saurais être mauvaise, il s'agit d'un livre pour les 9-11 ans donc c'est tout à fait à leur portée, ni trop dur, ni trop simple.

C'est là tout de même ou j'aurai tendance à formuler une vraie critique qui ne soit pas en rapport avec l'âge du lecteur. J'ai trouvé cette quête quand même beaucoup trop simple, j'attendais un peu plus. J'ai eu l'impression d'un voyage linéaire à étape rapide. Si je compare avec une autre série à quête que j'aime beaucoup, Percy Jackson, je trouve que Rick Riordan s'en tire mieux. Le premier tome de Rick Riordan est lisible aussi par des 9-11 ans car le héros à le même âge que Grégor et l'ensemble m'a parut moins téléphoné.

Malgré tout, je râle, je râle mais j'ai bien aimé. C'est très plaisant et même si le monde Souterrien et ses habitants ne sont pas d'une originalité folle j'ai beaucoup aimé Moufle, les Grouilleurs, Vikus et le rat Ripred, certainement le personnage le plus intéressant de ce tome 1 (j'imagine déjà Michael Sheen interprétant la voix du rat!).
Je n'aime pas la princesse ou plutôt son genre de personnage. J'adorais ce type de princesse-enfant-super-guerrière quand j'étais adolescente, maintenant beaucoup moins. Ce n'est pas un mauvais personnage, c'est simplement moi qui n'entre pas en adéquation avec elle.

J'admets en revanche que je ne m'attendais pas à un certain rebondissement vers la fin, je suis restée très surprise (mais dans le bon sens du terme), vraiment je ne m'y attendais pas.

Il faut garder à l'esprit qu'il s'agit: d'un premier tome et que sûrement au vu des 4 suivants, il fait figure d'introduction et que c'est un vrai roman jeunesse 9-11 ans et moins un de ceux capables de plaire aussi aux adultes.

Le tome 2 est sorti hier (1er juin 2012) et je le lirai avec plaisir. Un dernier petit mot, je trouve que la couverture américaine est vraiment sympathique. Elle a un petit côté rétro très agréable mais je comprends le choix plus conventionnel de la couverture française qui est très jolie aussi.

Merci à Cécile et à Hachette/Lecture-academy pour ce roman!