A NE PAS MANQUER
Présentation de l'éditeur: 1962. La famille de Simon déménage. Elle quitte le nord de Paris pour s’installer à une vingtaine de kilomètres, à Champigny-sur-Marne. Tout le monde est déjà parti mais il reste à faire bouger Mémé. La grand-mère tout juste arrivée d’Algérie refuse catégoriquement de monter dans une voiture, un bus ou un métro. Elle veut marcher, un point c’est tout. Simon, son petit-fils, se voit chargé de l’accompagner à travers la capitale et la proche banlieue. En chemin, Mémé va de découverte en découverte. «T’y as vu celle-là… la jupe courte qu’elle porte et serrée… et çui-là, comme ça y dort ? Ici par terre ?…C’est pas possible ma mère… Qu’est-ce qu’on peut voir ici en France ! »
Ce petit livre est plein de poésie et chargé d'Histoire. Gil Ben Aych nous offre un moment admirable, la rencontre entre deux univers.
Ce roman détaille avec une grande finesse et une belle émotion le dernier chapitre du roman L'essuie-main des pieds du même auteur.
Etoile que l'on appelle Mémé est une pied-noire juive d'Algérie. En 1956 elle suit sa famille en France et s'installe chez son fils le papa de Simon. Mais bientôt la famille déménage à Champigny près de Maman et Papa chéri, les parents de la mère de Simon. Commence alors pour le petit garçon un voyage qu'il n'est pas près d'oublier car Mémé marche. Mémé c'est cette vieille dame restée coincée à Tlemcen, ville où l'on fait tout à pied ou à dos d'âne, ville où tout le monde est ton voisin et où il est impensable de passer devant la maison d'un proche sans s'arrêter lui dire bonjour.
Simon et Mémé vont donc devoir traverser Paris pour atteindre la nouvelle maison où l'on fait la fête. J'ai vraiment été touché par ce court roman parce qu'on sent bien le décalage entre les deux personnages. Ils nous font rire et nous énervent tour à tour. Si je comprends l'impatience de Simon, je m'émerveille aussi des découvertes de Mémé, de ses arrêts devant les boutiques qu'il n'y a pas en Algérie, ses commentaires sur les femmes de Paris qui ne ressemblent pas aux femmes de Tlemcen.
Le choc des cultures est assez grand. J'ai beaucoup rit lorsque Mémé demande un "citronné" au lieu d'un "citron pressé" et qu'elle ne comprend pas la différence.
Sa première visite du métro et du bus est assez épique aussi mais je pense que cela peut faire réfléchir les jeunes générations qui considèrent le progrès comme acquis. A travers les yeux de Mémé, l'on voit tout ce qu'on a gagné et ce qu'on a perdu.
Je n'ai pu m'empêché de trouver Simon très injuste envers cette grand-mère qu'il ne comprend pas et qu'il tire désespérément par la manche. Peut-être est-ce parce que sa grand mère préférée c'est Maman Chérie et non Mémé? Peut-être aussi parce que lui qui a quitté l'Algérie depuis longtemps dans sa tête ne comprend pas cette vieille femme qui se raccroche à sa vie? Si de temps en temps ses deux personnages se rencontrent, la plupart du temps ils restent isolés dans leur bulle, ignorant de la sphère de l'autre.
Le voyage nous mène dans différents coins de Paris et c'est aussi ce qu'il y a à "voir" dans ce roman. J'ai beaucoup aimé la réutilisation du vocabulaire pied-noir et la réutilisation du parler "mère juive" de Mémé. Ce livre à un goût particulier, il est plein d'odeur et de saveur. Mémé est une femme simple mais une bonne femme qui prend soin des siens.
Un roman avec un petit goût amer du passé et un joli goût sucré des souvenirs. A lire absolument!
Merci à Doriane et à l'Ecole des loisirs pour cette très jolie découverte.
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