Résumé: Dans un futur proche, une espèce extraterrestre hostile, les Doryphores,
ont attaqué la Terre. Sans l’héroïsme de Mazer Rackham, le commandant
de la Flotte Internationale, le combat aurait été perdu. Depuis, le très
respecté colonel Graff et les forces militaires terriennes entraînent
les meilleurs jeunes esprits pour former des officiers émérites et
découvrir dans leurs rangs celui qui pourra contrer la prochaine
attaque. Ender Wiggin, un garçon timide mais doté d’une exceptionnelle
intelligence tactique, est sélectionné pour rejoindre l’élite. A
l’académie, Ender apprend rapidement à maîtriser des manoeuvres
militaires de plus en plus difficiles où son sens de la stratégie fait
merveille. Graff ne tarde pas à le considérer comme le meilleur élément
et le plus grand espoir de l’humanité.
CASTING
Asa Butterfield ............................................ Ender Wiggin
Harrison Ford .............................................. Colonel Graff
Hailee Steinfeld ........................................... Petra Arkanian
Abigail Breslin ............................................ Valentine Wiggin
Ben Kingsley ............................................... Mazer Rackham
Viola Davis .................................................. Major Gwen Anderson
Aramis Knight ............................................. Bean
Suraj Partha ................................................. Alai
Moises Arias ............................................... Bonzo Madrid
Khylin Rhambo ........................................... Dink Meeker
Jimmy "Jax" Pinchak .................................. Peter Wiggin
Nonso Anozie ............................................. Sergeant Dap
Conor Carroll .............................................. Bernard
Caleb Thaggard ........................................... Stilson
Brandon Soo Hoo ........................................ Fly Molo
Cette chronique arrive sans doute après la bataille, le film n'étant plus à l'affiche, mais j'avais besoin de temps pour réfléchir à ce que j'allais écrire. D'une part parce que je n'ai pas lu le livre et que mon jugement ce fait donc uniquement sur le film que j'ai vu et d'autre part parce mon avis est un mélange d'enthousiasme et de déception.
Compliqué n'est-il pas?
Je n'ai pas lu le roman ce qui est un point important à retenir car de ce fait, je ne juge le film et son scénario, uniquement sur ce que j'ai vu. Je m'excuse auprès de mes lecteurs/trices qui ne connaitraient ni le livre ni le film mais je suis obligée de faire une chronique avec spoilers pour bien faire comprendre mon point de vue. Apologies donc, dear reader.
En premier lieu, je dois admettre que j'ai trouvé le visuel de la Stratégie Ender vraiment beau et agréable. S'il y a une débauche d'images numériques, elles passent plutôt bien à l'écran. L'univers recréé est assez proche du nôtre pour mettre le spectateur dans une zone de confort, tout en propulsant ce dernier dans un environnement SF impossible à renier, ne serait-ce que par l'Académie de Graff, satellite qui surplombe la Terre. Tablettes tactiles, écrans transparents, systèmes d'écriture intuitifs qui répondent à une seule main, rien que nous n'imaginions déjà ou que nous n'ayons, compensés par cette salle de gravité zéro dont les murs transparents offrent une vue plongeante et angoissante sur la Terre et l'espace.
Il y a d'ailleurs, à mon sens, dans l'ensemble visuel d'Ender, un véritable lien avec la science-fiction depuis les années 60. En digne héritier de près de 50 ans d'histoire télévisuelle et cinématographique, j'ai trouvé que le film reprenait de nombreux codes déjà utilisé ailleurs. L'Académie, qui n'est pas sans rappeler Starfleet, est dirigée selon un code de couleur que l'on retrouve dans les différents costumes des membres de L'Enterprise. L'atmosphère de l'Académie ainsi que le décor est un croisement entre Star Trek et Battlestar Galactica, rien de nouveau donc mais ce n'est pas le reproche que je lui fais.
J'ai beaucoup apprécié les scènes de batailles en apesanteur, très belles à regarder avec une certaine grâce, surtout la dernière où Ender et ses coéquipiers doivent affronter toutes les autres équipes. Je ne suis pas étonnée d'apprendre que les acteurs/trices ont reçu un entraînement individuel de la part de professionnels du cirque. On sent très bien ce côté aérien dans leur façon de se déplacer.
Mais...
Justement je trouve que cette atmosphère est une sorte de cache-misère pour un film qui peine à trouver son souffle. Si La stratégie Ender est très beau à regarder, il n'en reste pas moins que c'est finalement son principal défaut: miser sur un décor plus que sur une réelle interprétation d'une œuvre dont l'auteur est pourtant l'un des producteurs.
Ce jugement peut sembler très dur mais je le maintiens. Sans connaître les tenants et les aboutissants du film, mon attente est montée crescendo durant la projection pour aller s'écraser sur un mur de déception dès le retour de la lumière. Le film ne tient pas ses promesses. Arrivé en bout de parcours on se demande presque si la majeure partie de ce qu'on vient de voir, n'était pas finalement que du remplissage, les scénaristes étant passés à côté de leur véritable histoire.
Pour vous donner une idée de mon sentiment, j'ai l'impression qu'avec le film La stratégie Ender on ne fait que gratouiller la surface d'une histoire bien plus colossale que ce qu'on me laisse voir. Cette frustration intense qui naît de l'impression, qu'au fond, le film regorge d'un potentiel jamais pleinement exploité ou qui se concentre sur des détails un peu tape-à-l'oeil au lieu d'interrogations fondamentales.
La faute incombe à cette grande disproportion qu'il y a entre l'entraînement d'Ender et la réalisation de ses buts. Mal dosée et mal exploitée, cette longue partie - qui tient quand même les 3/4 du film - semble finalement anecdotique au regard de la bombe qu'est le dernier quart. Comment penser qu'ils ont pu passer tant de temps à nous raconter l'entraînement d'Ender à l'Académie et finalement bâcler en 20 minutes les étapes les plus importantes de son parcours psychologique jusqu'à l'apothéose finale? Parce que c'est bien de montrer l'intelligence d'Ender dans un entraînement de bataille à gravité zéro mais la conclusion du film sur le lien psychique entre lui et la reine Doryphore tombe lamentablement à plat puisqu'elle vient de nulle part.
Comme dans le roman j'imagine (oui j'admets on m'a dit que c'était le cas), le spectateur/trice colle à Ender pour le comprendre et comprendre aussi ce qui se passe dans sa tête. Or ici, à l'écran, l'effet passe complètement à côté de ce qui est désiré. En étant littéralement scotché aux basques d'Ender, on oublie d'être dans sa tête et de suivre son parcours psychologique.
La stratégie Ender manque de souffle et de violence. Etonnant pour une histoire aussi forte mais oui, je suis convaincue que le film ne va jamais assez loin que ce soit dans le traitement de la violence physique ou surtout psychologique des personnages. Six ans d'entraînement réduits en une seule année aurait pu être une bonne idée s'ils avaient su maintenir le rythme. En s'attardant trop volontiers sur les affrontements entre les équipes de l'Académie, on perd le côté brutal d'un tel entraînement. Certes on nous dit qu'ils travaillent dur et dorment peu mais le ressenti à l'écran n'est pas du tout le même. La seule ébauche de cette violence quotidienne se tient dans les quelques minutes des simulations en vu de l'assaut final. Quelques minutes seulement pour retranscrire une sorte de maltraitance psychologique, car ne nous leurrons pas, c'est bien de ça dont il s'agit: faire de ces enfants des machines. Je trouve dommage d'avoir laissé échapper ce point car il aurait été fondamental pour comprendre le cheminement que fait Ender.
Le scénario se concentre trop sur l'aspect leader d'Ender - notamment dans ses affrontements répétés avec les autres membres de l'Académie - au lieu de nous faire comprendre les bouleversements psychologiques qu'il subit. Je pense sincèrement qu'ils se trompent d'histoire en accusant l'effet leader au détriment de ce qu'il ressent.
Je l'ai dit plus haut, la fin tombe complètement à plat. Entre le moment où Ender se rend compte de ce qu'il vient de faire, sa réalisation que le peuple des Doryphores n'étaient pas des ennemis et la révélation que son rêve marquait en fait un lien de télépathie avec la reine Doryphore, il ne s'écoule que cinq minutes. Effet de surprise garanti mais qui provoque plus de questionnements que de réactions enthousiastes. Comme si d'un seul coup nous basculions dans un autre film. Parce que oui, on nous rabâche tellement l'importance de la qualité de leader d'Ender que le spectateur/trice fini par croire que la vraie question du film est: va-t-il arriver à gérer son équipe jusqu'au bout sans craquer? Alors que la vraie question est à des milliers d'années lumières de ça. C'est sans doute plus clair pour ceux qui ont lu le livre mais pour moi, cela a abaissé un verrou sur ce que je venais de voir en remettant tout en cause - et pas dans le bon sens du terme.
Trop de questions sont laissées en suspend et jamais remises en cause, exemple: Mazer Rackham. Le type que l'on dit mort en héros depuis 30 ans facile qui réapparait d'un coup d'un seul. Coucou c'est moi, sans qu'Ender ne remette en cause tout ce qu'on lui dit depuis le début. Je sais ce que c'est que l'endoctrinement mais nous avons quand même en face de nous l'être humain le plus intelligent du monde. Je me dis que tout ça est très mal amené parce que si c'est une incohérence déjà présente dans le roman, ça craint (si quelqu'un a la réponse...).
Attachement à Ender oui. Compréhension de son intellect et de ce qu'il vit, jamais. En se concentrant de cette façon sur l'adolescent, le film en oublie ses personnages secondaires ou les exploite de façon anecdotique.
Les personnages qu'Ender rencontrent à l'Académie sont finalement à peine esquissé. Bean et Alai pour ne citer qu'eux sont de gentils stéréotypes de sidekick. On ne comprend pas ce qui lie finalement Ender à la bande qu'il dirige lors de l'assaut final. Un peu comme s'ils avaient été recrutés parmi les moins jaloux du groupe.
Il faudrait également parler de Petra, personnage mou au possible qui en plus de cumuler les clichés anti-féministes - non ce n'est pas parce qu'on dit qu'elle est forte dans leur jeu de bataille que c'est un personnage féministe - n'apporte pas grand chose à l'histoire globale. Renvoyée systématiquement à sa douceur et à son côté protecteur, Petra manque de peps. C'est d'autant plus désolant lorsqu'on a pu assister au premier rôle de l'actrice en question. Comment penser que celle qui a si bien joué dans True Grit puisse se retrouver avec un rôle inconsistant? Manque de direction d'acteur flagrante qui se confirme avec le personnage de Gwen Anderson.
Au départ Anderson et Graff étaient tous les deux des hommes. Orson Scott Card a voulu féminiser l'un des personnages et a pensé d'abord à Graff avant de changer d'avis. Pas de bol, nous nous retrouvons donc avec une psychologue qui démissionne car elle n'arrive pas à faire face à la cruauté de Graff. Le personnage de Gwen Anderson est donc renvoyé à son côté maternel et protecteur tandis que Graff assume la responsabilité du militaire froid et calculateur. A ce niveau là j'aurai préféré deux hommes, au moins le cliché maternel nous aurait été épargné. Graff en femme aurait été assez novateur dans la représentation des femmes de pouvoir en Science-fiction et aurait fait pas mal de bien à des codes stéréotypés vus et revus.
Autant dire qu'entre Petra et Anderson j'étais amèrement déçue.
Je suis frustrée parce que j'ai l'impression d'être passée à côté d'une histoire impressionnante, violente avec une grande réflexion sur l'humanité et ses choix et d'avoir eu le droit, à la place, a une esquisse pâlichonne.
La stratégie Ender est pour moi le film de tous les déséquilibres: disproportions dans les choix de récit, dans le traitement des personnages ou dans la surenchère d'images au détriment du fond. Un film qui divertit mais laisse terriblement sur sa faim une fois la projection achevée. J'ai hâte de lire le roman pour combler tout ce vide.
7 commentaires:
Vraiment d'accord avec toi, surtout sur le fait que le film en vient à valoriser la position de leader alors qu'en fait, on est tout bonnement dans une usine de fabrication d'enfants-soldats. Je rajouterais que la performance d'Harrison Ford est scandaleuse: son jeu est tout bonnement inexistant! Aucune expressivité! Alors qu'on a quand même un beau personnage de stratège manipulateur, on a l'impression d'avoir affaire à une brute impassible....
Je dirais que ce n'est pas tellement Harrison Ford que la direction d'acteurs la fautive. La relation Ender-Graff est vide hormis quelques affrontements puérils. La Dame l'explique assez bien d'ailleurs, c'est une relation qui n'existe pas donc leur affrontement final tombe à plat.
Et puis regarde, à la fin il n'y a qu'Ender à se révolter sur le fait qu'on l'ait manipulé pour anéantir une espèce. Les autres enfants ne réagissent pas alors qu'on attend quand même quelque chose de leur part. Résultat: Ender paraît très bête. "Tu es mignon mais un petit peu ...."
Dommage ! je voulais voir ce film ! c'est frustrant quand l'esthétique prime sur la profondeur !
Il n'est pas désagréable à regarder. C'est un bon divertissement. Si tu veux une réflexion laisse tomber c'est sûr.
J'avais envie d'y croire, à ce "Ender" au cinéma, mais au final... Etant donné le réalisateur choisi, ce n'est pas une surprise, mais tout de même, la déception reste là.
L'idée de produire "Ender" en 2013 est de plus assez clairement motivée par l'envie de dégainer un autre film "jeunesse" afin de profiter de la vague "Hunger Games".
Ceci dit, le film donne une plus grande visibilité au cycle d'Orson Scott Card et bien qu'il soit insatisfaisant, il n'est pas non plus complètement nul ou en totale contradiction avec l'esprit de "La Stratégie Ender". Son plus grand crime est d'être au livre ce que la Vache qui Rit est au roquefort.
Sur cette somptueuse métaphore fromagère, salut !
J'ai envie de voir le film (sans avoir lu le livre) du coup je n'ose pas lire ton article à cause des spoilers! ;)
@La Dame: Oui il y a clairement un côté "marketing film young adults" c'est dommage parce que je pense justement que les young adults peuvent appréhender un univers plus riche que ce que montre le film.
Et j'adore ta métaphore fromagère!
@Chi-chi: tu fais bien ça serait dommage de te gâcher le film!
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